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DES ROBOTS DANS LES BLOCS

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Opérer avec plus de précision, réduire les temps de convalescence et faciliter le travail des chirurgiens : c’est tout l’objectif de la robotique chirurgicale, domaine où les innovations sont constantes. En témoigne le cockpit chirurgical développé au sein de l’ISIR de Sorbonne Université.

La robotique médicale a sa figure de proue, et elle porte un nom célèbre. Né en 2001, le robot Da Vinci s’est écoulé à près de 6 000 exemplaires et a permis d’opérer 8 millions de patients depuis. En vingt ans, la machine mise au point par la société californienne Intuitive Surgical a fait ses preuves comme l’explique Jérôme Szewczyk, responsable de l’équipe Assistance aux Gestes et Applications Thérapeutiques (AGATHE) de l’ISIR. De fait, certaines chirurgies, comme la prostatectomie ou l’hystérectomie sont aujourd’hui réalisées à plus de 90 % par voie robotique. 

 Jérôme Szewczyk © Pierre Kitmzcher, Sorbonne Université

Haute précision

Mais une machine comme le Da Vinci ne saurait en aucun cas devenir la version robotisée de l’Universelle Panacée : coûteuse – deux millions d’euros pour le Da Vinci Xi, l’un des modèles les plus performants – elle demande un calibrage fin, occupe une place considérable et coupe le chirurgien, placé derrière une console, de ses équipes et du patient. L’avenir passe donc aussi par le développement de robots plus légers qui implique davantage le chirurgien, estime Jérôme Szewczyk. C’est tout l’objectif du projet Surgical Cockpit, un robot qui parie sur l’interaction homme/machine et repose sur le principe de co-manipulation. 

Développé en lien étroit avec le monde médical, le cockpit chirurgical s’intéresse à des domaines variés. « Nous travaillons en particulier sur des sujets liés à des interventions sur le rachis, un domaine de la chirurgie orthopédique qui se prête bien à une opération robotisée puisqu’il s’agit d’intervenir sur des vertèbres. La machine peut apporter beaucoup quand on intervient sur des os, qui sont des objets assez solides et immobiles pour que le robot puisse guider des gestes, des trajectoires, etc. ». Autre domaine d’expérimentation ciblé : la chirurgie laparoscopique, qu’elle soit à visée digestive ou gynécologique. « On touche à la cavité abdominale pour des interventions sur le foie, l’estomac, les reins, la vessie, l’utérus, etc. Le praticien n’a pas de vue directe sur l’organe qu’il opère, mais visualise la scène par l’intermédiaire d’un endoscope », explique Jérôme Szewczyk.

© Cyril FRÉSILLON / ISIR / CNRS Photothèque
Légende : Test d’un système robotisé d’assistance à la chirurgie cœlioscopique. Cette technique permet d’observer l’intérieur de la cavité abdominale et d’intervenir sur les organes, grâce à des instruments (caméra et instruments chirurgicaux) insérés dans la paroi abdominale via de petites incisions. Elle réduit le risque de complications pour le patient mais comporte des spécificités pour le chirurgien : distorsion haptique (du sens du toucher), ergonomie, poids et encombrement des instruments, gestion de la caméra, etc. Ce système robotisé vise à améliorer le confort, l’autonomie et la précision du chirurgien lors des procédures. C’est le bras robotisé qui porte le poids des instruments, ce qui réduit le besoin d’un assistant, et qui positionne automatiquement la caméra de façon à avoir toujours la pointe de l’instrument au centre de l’image. Le robot filtre les tremblements de la main du chirurgien, qui peut également circonscrire la zone d’action des instruments grâce à la réalité augmentée. © Cyril FRÉSILLON / ISIR / CNRS Photothèque

Inspiré de l’aéronautique

Enfin, dans un registre radicalement différent, la neurochirurgie fait également partie des voies explorées par les chercheuses et chercheurs de l’équipe AGATHE. Toutes partagent un point commun : ce sont autant d’interventions délicates qui demandent précision et assurance. C’est là qu’intervient le concept de cockpit chirurgical, un terme inspiré de l’aéronautique, explique le professeur Szewczyk. « Comme dans le poste de pilotage d’un avion, il s’agit de mettre à disposition du « commandant de bord » les données dont il a besoin en temps réel pour pouvoir agir sur l’ensemble des outils à sa disposition. Le bloc opératoire est équipé pour permettre la remontée constante des informations utiles au chirurgien en intégrant, par exemple, les données d’imagerie qu’on peut rapatrier pendant l’opération ». 

Dans ce système, c’est bien le praticien qui manipule l’outil au contact direct des patients, comme dans une opération manuelle classique, mais ses outils sont portés par un bras robotique dont le rôle consiste à corriger le geste en cas de besoin. « Il s’agit de lui offrir les moyens de mener son intervention avec l’aide des bras qui portent ses instruments, guident ses gestes, reproduisent le sens du toucher, freinent tel ou tel mouvement, compensent les tremblements de la main, etc. ». Pour le plus grand bien du patient ! « Favoriser la chirurgie mini-invasive permet de réduire l’agression chirurgicale, donc de minimiser le risque de complications et de réduire les douleurs post-opératoires, avec des temps de convalescence plus courts », explique le chercheur.

Après des essais in vivo chez l’animal, la technologie a été transférée mi-2019 à la société Moon Surgical, cofondée par le Dr Brice Gayet, ancien membre de l’équipe AGATHE et chirurgien laparoscopique mondialement reconnu. L’entreprise, qui intègre les technologies développées au sein de l’ISIR, a déjà mené ses premiers essais sur l’homme, étape indispensable dans le long tunnel réglementaire qui conduira à la mise sur le marché de son système Maestro. 


Source de l’article : Sorbonne Université.

Contact référent : Jérôme Szewczyk, Professeur des Universités