Au-delà de la vue et de l’ouïe, les dispositifs de Réalité Virtuelle (RV) s’intéressent au sens du toucher pour proposer une expérience toujours plus immersive. L’haptique est un domaine de recherche très étudié à l’ISIR. Focus sur la plateforme de RV à l’initiative d’Elodie Bouzbib, ancienne doctorante du laboratoire, qui a obtenu le prix de la meilleure thèse pluridisciplinaire 2022 de l’AFIHM.
La Réalité Virtuelle est utilisée dans de nombreux domaines tels que le divertissement, l’éducation ou encore la formation, autant de secteurs qui nécessitent un haut niveau de réalisme. Malgré l’intégration de la vision et des signaux auditifs dans les systèmes virtuels, il manque encore quelque chose pour que l’immersion soit totale : la sensation du toucher.
Le monde virtuel s’intéresse donc de plus en plus au sens du toucher qui peut être fourni par les technologies haptiques. La sensation du toucher permet de fournir des informations sensorielles supplémentaires. L’utilisateur·rice peut alors interagir physiquement avec des objets virtuels et obtenir, par un retour haptique, des sensations physiques.
L’intégration de l’haptique en Réalité Virtuelle
C’est pour ce domaine de recherche qu’Elodie Bouzbib, ancienne doctorante au sein de l’équipe Interactions Multi-Echelles de l’ISIR, a choisi de s’intéresser : l’intégration de l’haptique en RV. Elodie propose de décrire cette intégration haptique, à l’aspect multidimensionnel, selon trois perspectives :
- le retour haptique, qui correspond aux différents signaux haptiques stimulés et à leur intensité, perçue par l’utilisateur ;
- les techniques d’interaction, qui correspondent aux tâches que les utilisateurs peuvent effectuer et/ou les méthodes qui les rendent possibles ;
- et les solutions haptiques dont la perspective est basée sur le matériel.
A travers sa thèse, Elodie explore les défis et les opportunités selon ces trois catégories, en se concentrant sur la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des interfaces haptiques robotisées dans la RV. Elle promeut l’utilisation des solutions haptiques, et propose alors la conception, implémentation et évaluation de CoVR.
CoVR est une interface robotisée qui anticipe les intentions des utilisateurs intra- et inter-objets, et les rencontres physiquement avec un objet d’intérêt, avant que l’interaction ne survienne. Cette interface prodigue une multitude d’interactions avec à la fois des retours tactiles et kinesthésiques cohérents. Dans les faits, CoVR est une colonne physique montée sur un robot pour fournir une forte rétroaction kinesthésique dans une arène VR à l’échelle de la pièce. Les panneaux de la colonne sont interchangeables et ses mouvements peuvent atteindre en toute sécurité n’importe quel endroit dans l’arène VR, grâce aux déplacements et aux générations de trajectoires évitant les collisions avec l’utilisateur.
Naissance du projet fédérateur CoVR, une plateforme de réalité virtuelle
Elodie est à l’initiative de la première version de ce projet fédérateur. « J’ai construit une plateforme pour prodiguer des interactions multimodales en réalité virtuelle : l’interface robotique CoVR. Je pense que mes encadrants et moi avions la même vision quant à la conception et l’implémentation de cette plateforme, dès le début de ma thèse », explique-t-elle.
En à peine quelques mois, le système d’exploitation de la première version de CoVR était mis en place. Cette première version a permis de communiquer au reste du laboratoire l’ampleur des ambitions du projet et les potentiels bénéfices de cette interface. L’équipe a vite réalisé que cette plateforme pouvait profiter à de nombreux projets, et qu’il pourrait être intéressant de l’exploiter plus largement. Ce projet a donc été proposé en tant que projet fédérateur de l’ISIR, avec pour objectif d’avoir une plateforme qui centralise les recherches mixtes du laboratoire et qui facilite les collaborations inter et intra équipes. Après avoir été voté en conseil scientifique de l’ISIR, CoVR est passé de projet de thèse à projet fédérateur, impliquant alors un financement mutualisé du laboratoire et intégrant le service technique au projet.
« Ma thèse, mes recherches, ainsi que CoVR sont ancrées en Interaction Humain-Machine (IHM), mais mes domaines de recherche s’étendent aussi à l’haptique, la réalité virtuelle, et la robotique. Je pense que le projet fédérateur autour de CoVR est ainsi une belle démonstration de la pluridisciplinarité de notre laboratoire et du type de recherches menées à l’ISIR« , souligne Elodie.
Un cadre de recherche pluridisciplinaire
Un intégrant un laboratoire pluridisciplinaire comme l’ISIR, Elodie a pu être encadrée par des personnalités venant d’univers et de domaines de recherche différents. Ingénieure généraliste de formation, Elodie a eu l’opportunité de faire de l’informatique, de l’électronique, de l’IHM, du prototypage, ou encore du management dans ses expériences passées. « À l’ISIR, j’ai eu la chance d’être accueillie dans une équipe qui a valorisé ces compétences multiples », ajoute-t-elle.
Lors de sa thèse, Elodie était membre de l’équipe Interactions Multi-Echelles – un nom déjà révélateur de la pluridisciplinarité qui l’a entourée. Elle a réalisé son doctorat sous l’encadrement de deux permanents de l’ISIR : Gilles Bailly – Chargé de Recherche CNRS et de Sinan Haliyo – Maitre de Conférences (et de Pascal Frey, Laboratoire Jacques Louis Lions). « Gilles Bailly est un expert de l’IHM en France, avec une curiosité portant sur de nombreux domaines et évidemment des compétences associées. Sinan Haliyo est un expert en robotique et haptique. Ils m’ont transmis leur savoir, leurs compétences, et m’ont vraiment confirmé que la recherche académique – notamment à l’ISIR – permet de valoriser la pluridisciplinarité ainsi que la curiosité. Je me considère très chanceuse d’avoir bénéficié de ce cadre lors de ma thèse et souhaite à présent pouvoir partager les plaisirs de la recherche académique avec ces domaines mixtes, et des stimulations qui en découlent », poursuit Elodie.
Prix de la meilleure thèse pluridisciplinaire à la conférence IHM
Elodie poursuit actuellement ses recherches dans deux équipes à l’Inria Rennes Bretagne Atlantique (Hybrid et Rainbow) et communique cette vision, alliant recherche scientifique, stimulation, curiosité et plaisir. Elle a remporté le Prix de la Meilleure Thèse Pluridisciplinaire 2022 de l’Association Francophone d’Interaction Humain Machine (AFIHM). Elodie a été récompensée pour ses contributions scientifiques sur le sujet « Robotised Tangible User Interface for Multimodal Interactions in Virtual Reality: Anticipating Intentions to Physically Encounter the User ».
Contact référent : Elodie Bouzbib, chercheuse post-doctorale, https://www.bouzbib.com/elodie/
